LE FANTÔME DE L’OPÉRA (1925)

LE FANTÔME DE L’OPÉRA

FICHE TECHNIQUE

Titre français : Le Fantôme de l'Opéra
Titre original : The Phantom of the Opera
Autres titres : /

Réalisateur : Rupert Julian, Edward Sedgwick
Année : 1925
Pays : Etats-Unis
Musique : /
Genre : Drame, épouvante
Interdiction : /

Casting
Lon Chaney (Erik le fantôme)
Mary Philbin (Christine Daaé)
Norman Kerry (Vicomte Raoul de Chagny)
Arthur Edmund Carewe (Inspecteur Ledoux)
Gibson Gowland (Simon Buquet)
 Mary Fabian (Carlotta)
Virginia Pearson (La mère de Carlotta)

Compagnie de production : Universal Pictures

Première diffusion : 26 avril 1925 (San Francisco)

Durée : 93 minutes / 101 minutes (original) / 95 minutes (ressortie en 1929)


L'HISTOIRE
Deux nouvelles personnes sont nommées à la direction de l'Opéra de Paris. Ce lieu réputé vit sous la terreur d'un mystérieux personnage, que le personnel de l'Opéra surnomme Le Fantôme. Ce dernier a déjà causé plusieurs incidents et s'attribue la loge N°5, que personne n'ose louer. Les nouveaux directeurs reçoivent la visite de la mère de Carlotta, dont la fille est la prima donna de Faust, la nouvelle représentation qui fait fureur dans tout Paris. Cette dernière leur montre une lettre dans laquelle le Fantôme somme Carlotta de se faire porter malade afin de laisser sa place à une jeune chanteuse du nom de Christine Daaé. Celle-ci se produit donc sur la scène de l'Opéra et remporte un franc succès. La jeune femme, amoureuse du Vicomte Raoul de Chagny, entend des voix à travers les murs d'une personne déclarant vouloir la prendre sous son aile et lui faire connaître la gloire. Christine accepte la proposition de rencontrer l'inconnu sans se douter qu'il s'agit du Fantôme. Ce dernier invite la chanteuse dans son repaire, situé sous l'Opéra, dans les catacombes. Portant un masque voilant son visage, le Fantôme déclare sa flamme à Christine, qui reste apeurée devant son hôte. Le Fantôme parvient à la détendre en lui jouant une partition au piano qu'il a composé pour la jeune femme. Christine ne peut se résoudre à ne pas découvrir le visage qui sa cache sous le masque du Fantôme et parvient à lui ôter, dévoilant un horrible faciès mutilé. Elle provoque la colère du Fantôme qui désire épouser la jeune cantatrice. Christine parvient à s'échapper et, malgré les menaces du Fantôme, elle retrouve son fiancé Raoul lors du bal de l'Opéra. Le Fantôme y fait une apparition remarquée, déguisé en Mort Rouge. Sans savoir qu'ils sont espionnés par le Fantôme, Christine et Raoul se déclarent à nouveau leur amour. La vengeance du Fantôme va être terrible...

LA FIN DU FILM :  
Traqué par la foule en colère, Erik, le Fantôme de l'Opéra, se réfugie au bord de la Seine. Mais les parisiens parviennent à le rattraper. Après avoir été roué de coup, Erik sombre dans les eaux de la Seine.

MON AVIS
C'est en 1910 qu'est publié le roman de Gaston Leroux : Le Fantôme de l'Opéra. Le roman paraît déjà sous forme de feuilleton dans le journal Le Gaulois avant de sortir sous forme de livre. Le célèbre romancier, papa du détective Rouletabille entre autres, s'est apparemment inspiré de rumeurs sur de prétendus mystères s'étant déroulés dans les souterrains de l'Opéra Garnier de Paris au 19ème siècle.

Après l'énorme succès du film Notre-Dame de Paris, réalisé en 1923 par Wallace Worsley et basé sur le célèbre roman de Victor Hugo, le studio Universal décide de se livrer à une nouvelle adaptation de roman. C'est donc celui de Gaston Leroux qui est choisi. Pour reproduire le succès de Notre-Dame de Paris, le patron du studio, Carl Laemmle, accorde au film un budget plus que conséquent et ne se refuse rien. Il fait carrément reconstruire dans le célèbre studio 28 (le premier construit en ciment) le fameux Opéra Garnier, avec sa salle de bal, sa salle de spectacle et ses souterrains ! Un décor colossal, auquel s'ajoute le recrutement de 200 danseuses de ballet qui viennent rejoindre les membres du casting.

Malgré son contrat à la MGM, Carl Laemmle parvient à obtenir à nouveau l'acteur phare de Notre-Dame de Paris : Lon Chaney. Ce prestigieux acteur du muet, passé maître dans l'art du maquillage, va donc interpréter Erik, le fameux Fantôme terrorisant le personnel de l'Opéra et voulant promouvoir la jeune cantatrice Christine. Afin de laisser aux spectateurs le suspense de découvrir le nouveau maquillage que Chaney a composé pour ce rôle, il est absolument interdit de publier des photos de l'acteur grimé en Fantôme. La réaction du public, lorsque Christine retire le masque d'Erik, dépasse l'attente des producteurs ! D'après de vrais témoignages d'époque, des spectatrices se sont évanouies et ont du être évacuées du cinéma en ambulance, n'ayant pas supporté la vision du terrifiant maquillage de Chaney. Un maquillage devenu encore plus célèbre que le film lui-même, et qu'on retrouve sur bon nombre de couvertures de livres consacrés au cinéma fantastique.

Il faut dire que Lon Chaney a encore fait fort et que son personnage correspond tout à fait à la description de Gaston Leroux dans son roman : "Il est d’une prodigieuse maigreur et son habit noir flotte sur une charpente squelettique. Ses yeux sont si profonds qu’on ne distingue pas bien les prunelles immobiles. On ne voit, en somme, que deux grands trous noirs comme au crâne des morts". Le maquillage de Lon Chaney bénéficie en plus des talents du cameraman du film, avec qui l'acteur s'entendait très bien, et qui l'a donc filmé avec des éclairages plus ou moins sombres, ce qui renforce parfaitement son aspect macabre.

Si Lon Chaney est évidemment l'attraction principale de cette première adaptation du roman de Gaston Leroux, le film de Rupert Julian possède d'autres qualités. On a déjà parlé des décors, absolument faramineux, avec passage secret, pièces cachées, souterrains, lac aux eaux noires, salle de spectacle possédant un chandelier gigantesque et j'en passe. La mise en scène du réalisateur est également à mettre en avant, ainsi que l'aspect "épouvante" du film. En effet, il faut attendre un peu avant de découvrir le visage du Fantôme sans son masque. Tout le début du film joue savamment sur les ombres, le contre-jour, les perspectives, presque à la manière du cinéma expressionniste allemand. Rupert Julian peaufine l'ambiance et tente d'effrayer le public, tant est si bien que Carl Laemmle trouve que le film est trop terrifiant et manque de scènes d'humour. Il en fera tourner qu'il ajoutera au montage puis cédera et les retirera pour la sortie en salle. 

Les amateurs du roman originel apprécieront certainement cette version de 1925 puisqu'on y retrouve tout ce qui en faisait le charme ainsi que les péripéties majeures : les lettres de menace adressées aux directeurs et à Carlotta, la chute du chandelier, la loge N°5, le personnel apeuré, le traversée du miroir pour accéder au repaire du fantôme, le passage sur le lac, le Fantôme jouant au piano, la romance entre Christine et Raoul et, bien sûr, la fameuse scène du bal. Cette dernière a bénéficié de la technologie du Bichrome, c'est à dire qu'elle a été filmé en couleur ! Si tout le reste du film est en noir et blanc, cette longue séquence s'anime donc de couleur vive et laisse flamboyer le déguisement de la Mort Rouge que porte le Fantôme ! C'est vraiment magnifique.

Si on voulait citer quelques menus défauts ou faiblesses du film, je dirais que l'actrice interprétant Christine Daaé, Mary Philbin, fait preuve de peu de prestance et paraît assez fade. Le rythme du film manque parfois de tonus et l'interprétation théâtrale du casting pourra prêter à sourire. N'oublions pas que nous sommes en 1925 et que Le Fantôme de l'Opéra est un film muet, les acteurs devant donc avoir une gestuelle plus prononcée pour compenser le manque de parole. 

Hormis cela, le jeu de Lon Chaney est épatant, il parvient à retranscrire tout le désarroi, toute la détresse de son personnage et à en faire un "méchant" qu'on prend en affection.

Pour l'anecdote, Lon Chaney ne s'entendit pas du tout avec Rupert Julian, ce dernier ayant un ego surdimensionné. Le tournage fût donc assez compliqué puisque les deux hommes se parlaient à travers des lettres, que faisaient circuler le cameraman entre eux ! Rupert Julien fût d'ailleurs remercié avant la fin du tournage par le studio, tournage qui fût achevé par Edward Sedgwick.

Le Fantôme de l'Opéra a connu un formidable succès et le roman de Gaston Leroux s'est vu adapté à plusieurs reprises, que ce soit au théâtre, en opéra rock, à la télévision et même en chanson. Au cinéma, on citera la version de 1943 (Arthur Lubin), de 1962 (Terence Fisher), de 1989 (Dwight H. Little), de 1998 (Dario Argento) ou celle de 2004 (Joel Schumacher). Des variations existent également, comme le film La Vengeance d'Eric de Richard Friedman par exemple.

LA SCÈNE MARQUANTE :
Dans le repaire du Fantôme, Christine ne peut lutter face à son désir de retirer le masque de son mystérieux hôte. La découverte de son visage sera un choc, autant pour elle que pour les spectateurs.

CARACTÉRISTIQUES
- SCÉNARIO : 4/6
- VIOLENCE : 0/6
- GORE : 0/6
- NUDITÉ : 0/6
- APPRÉCIATION GLOBALE : 5/6


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LE FILM

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AELITA

AELITA

FICHE TECHNIQUE

Titre français : Aelita
Titre original : Aelita
Autres titres : Aelita, Queen of Mars

Réalisateur : Yakov Protazanov
Année : 1924
Pays : Russie
Musique : /
Genre : Science-fiction
Interdiction : /

Casting
Yuliya Solntseva (Aelita)
Nikolai Tsereteli (L'ingénieur Los)
Igor Ilyinsky (Kravtsov, le détective amateur)
Nikolai Batalov (Gusev)
Valentina Kuindzhi (Natasha, la femme de Los)
Pavel Pol (Viktor Ehrlich)
Yuri Zavadsky (Gol, gardien de la tour d'énergie)

Compagnie de production : Mezhrabpom-Rus

Première diffusion : 25 septembre 1924 (Russie)

Durée : 85 minutes / 104 minutes / 111 minutes (édition restaurée)


L'HISTOIRE
Décembre 1921. Toutes les radios du monde entier reçoivent un curieux message : "Anta… Odeli… Uta…" Pour l'ingénieur Los et son ami le scientifique Spiridonov, ce message crypté pourrait venir de Mars. Les deux hommes ont d'ailleurs le projet de construire une fusée pour aller explorer la planète Mars. Los, particulièrement impliqué dans ce projet, ne cesse de rêver de Mars. Il y voit Aelita, reine des Martiens, sa servante Ihoshka mais aussi Gol, gardien de la tour d'énergie et amoureux secret d'Aelita. Lorsqu'il n'est pas perdu dans ses rêveries martiennes, Los s'occupe de sa jeune épouse, Natasha, qui travaille dans un centre d'accueil. Elle fait la connaissance de Viktor Ehrlich et de sa femme Elena. Ces derniers, grâce à d'habiles mensonges, parviennent à s'installer dans l'immeuble de Los et à occuper son laboratoire. Ehrlich est un trafiquant rusé et il s'amuse à séduire Natasha, provoquant la jalousie de Los. La police n'arrive pas à mettre la main sur Ehrlich, qui n'arrête pas de voler du sucre. Kravtsov, un détective amateur, décide de mener l'enquête pour arrêter le voleur. Perdu, sentant que Natasha s'éloigne de lui pour Ehrlich, Los replonge dans ses rêves. Sur Mars, Aelita parvient à utiliser une machine conçue par Gol qui lui permet d'observer les habitants de la Terre. Elle aperçoit Los et tombe amoureuse du terrien, provoquant la jalousie de Gol qui détruit la machine. Pendant ce temps, des centaines de martiens sont mis en hibernation et entassés dans des caves car ils ne sont plus utiles à la planète. Sur Terre, Ehrlich poursuit son travail de séduction auprès de Natasha et réussit à l'inviter à un bal secret. Le cœur brisé, Los décide de quitter la ville pour aller travailler sur un chantier de construction. Le centre des réfugiés ferme ses portes et Natasha va travailler dans un orphelinat. Gusev, un soldat revenu de la guerre, se marie avec une infirmière. L'associé de Los lui annonce qu'il quitte la Russie mais qu'il a caché les plans de la fusée dans le cheminée. Los, ayant terminé sa mission sur le chantier, revient chez lui avec un bouquet de fleurs pour se réconcilier avec Natasha. Mais lorsqu'il l'aperçoit, il est persuadé qu'elle le trompe avec Ehrlich et il lui tire dessus. Il imagine alors qu'il se déguise en Spiridonov, part chercher les plans de la fusée, parvient à la faire construire. Il rencontre Gusev et les deux hommes décident de partir pour Mars. Ils embarquent sans le savoir le détective Kravtsov qui pense que Los est le voleur recherché. Les trois hommes arrivent sur Mars. Los fait connaissance avec Aelita et tombe sous son charme. Mais les trois terriens sont enfermés avec les esclaves dans les caves. En découvrant l’oppression subit par le peuple de Mars, Los et Gusev poussent les Martiens à se révolter contre le pouvoir des Anciens, aidés en cela par Aelita. Malheureusement, Los découvre que la reine n'est pas celle qu'il croit. Cette dernière ne veut que s'accaparer le pouvoir pour elle toute seule et lorsque la révolution est couronnée de succès, elle ordonne aux soldats de tirer sur les manifestants. Los est obligé de la tuer. Devant un tel fiasco et une telle tromperie, Los décide de revenir sur Terre...

LA FIN DU FILM :
En se réveillant, Los découvre que le message codé "Anta… Odeli… Uta…" n'est en fait qu'une publicité placardée dans toutes les rues de la ville pour une marque de pneus. Il apprend que sa femme est toujours en vie. Il se précipite à son chevet et celle-ci lui pardonne. Tous deux brûlent les plans de la fusée. Ehrlich est arrêté par la police.

MON AVIS :
Considéré comme la première super-production de science-fiction russe, Aelita est un film assez curieux car, comme vous avez pu le lire au niveau de l'histoire, les éléments de science-fiction se marient avec des thématiques plus terre à terre, telles l'histoire d'amour entre Los et Natasha, la jalousie, l'aspect policier avec l'apparition du détective amateur ou bien encore la vie en Union Soviétique après la guerre et la révolution russe avec les passages dans le centre de réfugiés.

Qui plus est, les séquences se déroulant sur Mars ne proviennent en fait que des rêves du personnage principal, l'ingénieur Los, qui s'évade ainsi des soucis de la vie.

Les scènes martiennes sont en tout cas celles qui retiendront l'attention du spectateur car, même si elles apparaissent datées, elles témoignent d'un bel aspect visuel. Les décors notamment renvoient au cubisme, à la géométrie, et pourraient aisément être taxés d’expressionnisme si le film avait été réalisé en Allemagne. Les costumes des martiens sont également bien dans l'esprit science-fictionnel, surtout ceux des gardes du palais d'Aelita, qui ressemblent presque à des robots. On pourrait également évoqué une forte influence égyptienne à propos de ces costumes. Celui de la reine Aelita est vraiment superbe, on penserait même qu'elle est pourvue de trois seins (pourquoi pas pour une habitante de Mars ?), dommage que l'actrice qui l'interprète (Yuliya Solntseva) ne soit pas très charismatique, ni même franchement sexy, du moins au niveau de son visage, assez froid et sans beaucoup de charme.

Le soucis d'Aelita, c'est que le film joue sur trop de tableaux pour convaincre totalement. Car la science-fiction n'est au final pas ce qui intéresse le plus le réalisateur Yakov Protazanov. A bien y regarder, Aelita est avant tout une vision de la Nouvelle Politique Economique de la Russie, qui débuta justement en 1921, année de réalisation du film. On pourrait même y voir un film de propagande.

Les séquences "terrestres" ont été pour ma part assez ennuyeuses à regarder. Tantôt mélodramatiques (la relation Los / Natasha qui se désagrège progressivement), tantôt policières teintée d'humour (l'enquête du détective amateur, le stratagème d'Ehrlich pour parvenir à ses fins et duper Natasha...), ces scènes n'ont guère éveillé ma curiosité et 'ont pas su capter mon attention, à contrario des séquences se déroulant sur Mars, captivantes et hypnotiques.

Il y a tout de même un autre point qui fait d'Aelita une oeuvre importante (ce qu'elle est même si elle ne m'a pas emballé plus que ça) : son final avec la révolte des esclaves martiens contre leurs dirigeants ! Et ce, trois ans avant Metropolis ! Car oui, sur bien des aspects, Aelita préfigure le chef-d'oeuvre de Fritz Lang à venir.

Si Aelita a été très bien reçu par le public lors de sa sortie en 1924, le film de Yakov Protazanov n'a pas conquit la presse qui n'a pas été subjugué par le mélange des genres. C'est principalement ce que je reprocherais également au film, de trop se focaliser sur les intrigues secondaires qui en ralentissent le rythme. Reste de belles images, de beaux décors, de beaux costumes pour ce semi-film de science-fiction.

LA SCÈNE MARQUANTE :
N'étant plus d'aucune utilité, les travailleurs martiens sont mis au rebut, figés, ballottés comme des colis et balancés les uns sur les autres comme une vulgaire marchandise, s’amoncelant tel un amas de cadavres.

CARACTÉRISTIQUES
- SCÉNARIO : 4/6
- VIOLENCE : 0/6
- GORE : 0/6
- NUDITÉ : 0/6
- APPRÉCIATION GLOBALE : 3/6


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LE FILM :

Disponible en DVD chez Bach Films ou aux Editions Montparnasse

NOTRE DAME DE PARIS

NOTRE DAME DE PARIS

FICHE TECHNIQUE

Titre français : Notre Dame de Paris
Titre original : The Hunchback of Notre Dame 
Autres titres : Le Bossu de Notre-Dame / Quasimodo

Réalisateur : Wallace Worsley
Année : 1923
Pays : Etats-Unis
Musique : /
Genre : Drame, épouvante
Interdiction : /

Casting
Lon Chaney (Quasimodo)
Patsy Ruth Miller (Esmeralda)
Norman Kerry (Phoebus de Chateaupers)
Nigel De Brulier (Don Claudio)
Ernest Torrence (Clopin )
Raymond Hatton (Gringoire)

Compagnie de production : Universal Pictures

Première diffusion : 2 septembre 1923 (Etats-Unis)

Durée : 117 minutes


L'HISTOIRE
Paris, au XVème siècle. Au abord de la cathédrale de Notre Dame, la fête des fous bat son plein. C'est le seul jour où le peuple, opprimé par la tyrannie du Roi Louis XI, peut se laisser aller et vivre pleinement sans crainte de représailles. Perché au sommet de la cathédrale, Quasimodo, le sonneur de cloches bossu, quasiment sourd et à moitié aveugle, regarde la foule s'amuser, boire, se chamailler, tout en se moquant d'eux. Souffre-douleur des habitants du fait de sa difformité, Quasimodo ne porte pas les gens dans son cœur et seul le son des cloches lui apporte un peu de bonheur. Assis sur les marches de la cathédrale, Clopin, le roi des brigands, rêve secrètement de renverser le roi tyrannique. Esmeralda, sa fille adoptive, se présente à la fête et se fait acclamer par le public. Seule Marie, reine des gitans qui a perdu sa fille lorsqu'elle n'était qu'une enfant, ne supporte pas de voir Esmeralda. La fête des fous se clôture par l'élection du "Roi des fous" et la foule nomine Quasimodo. Portant une couronne, le bossu de Notre Dame est la risée de la foule. Pour divertir le public, Esmeralda se met à danser, déchaînant l'hystérie de la foule. Ne supportant plus le bruit, le roi Louis XI nomme Phoebus de Chateaupers capitaine de la garde et le somme de mettre fin à la fête des fous. Phoebus a une fiancée, Fleur de Lys. Mais quand il voit Esmeralda danser, son cœur chavire. Malheureusement, la belle gitane est également convoité par Jehan, le frère de l'archidiacre. Jehan demande à Quasimodo de kidnapper Esmeralda. La pauvre bossu s'exécute mais tombe sur Phoebus et ses hommes. Jehan se sauve et laisse Quasimodo aux mains de l'armée du roi. Le bossu de Notre Dame se voit châtié en place publique et reçoit de nombreux coups de fouet sous les applaudissements de la foule. Seule Esmeralda prend la pauvre créature en pitié. Phoebus parvient à charmer Esmeralda, provoquant la colère de Jehan. Il parvient à poignarder Phoebus lors d'un rendez-vous amoureux avec sa belle. Esmeralda est accusée de tentative d'assassinat et livrée à l'inquisition. Sous la torture, elle se déclare coupable. Jehan lui propose un marché mais elle refuse. Elle est condamnée à être pendu sur le parvis de la cathédrale. Quasimodo parvient à la délivrer et il l'entraîne à l'intérieur de Notre Dame. Les soldats du roi ne peuvent pénétrer dans l'enceinte sacrée sous peine de violation du droit d'asile. Clopin et son armée de gueux en profite pour déclencher une émeute. Ses partisans tentent de forcer l'entrée de la cathédrale. Monté tout en haut de Notre Dame, Quasimodo leur jette des pierres. Il aperçoit Jehan qui est parvenu à monter en haut de la cathédrale et qui tente de violenter Esmeralda. Un combat s'engage entre Jehan et le bossu. Quasimodo projette Jehan dans le vide mais ce dernier a le temps de le poignarder mortellement. Phoebus, remis de sa blessure, se rue à Notre Dame et rejoint Esmeralda. 

LA FIN DU FILM :
Phoebus raccompagne Esmeralda et lui déclare sa flamme. Les deux amoureux vont pouvoir vivre leur passion. Dans un dernier souffle, Quasimodo parvient à faire sonner une dernière fois les cloches de Notre Dame. Son corps est découvert par l'archidiacre qui lui rend hommage dans une dernière prière.

MON AVIS :
Bon, avant toute chose, mettons d'entrée de jeu les points sur les "i" : JE SAIS que Notre Dame de Paris, adaptation cinématographique du célèbre roman de Victor Hugo, n'a absolument rien de "fantastique" : pas de phénomènes inexpliqués, pas de fantômes, de vampires, de loups-garous ni même un semblant de suspense ou d'ambiance ténébreuse qui pourrait vous faire frémir, dresser les poils des bras ou les cheveux sur la tête. C'est un drame avant tout, teinté de romance, point à la ligne. 

Pourquoi donc le faire figurer sur ce blog alors vous demandez-vous et vous avez raison. C'est une bonne question. 

Quelles réponses puis-je apporter ? Simple en fait. 

Déjà, il suffit de lire le nom de la firme qui a produit le film : Universal Pictures. Le studio qui va devenir mondialement célèbre dès le début des années 30 avec la série de films qu'on a surnommé les "Universal Monsters" et qui ont donné leur lettre de noblesse au cinéma fantastique, faisant naître un véritable âge d'or pour le genre. 

Produit avec un budget faramineux d'environ 1,25 million de dollars environ, ce qui en fit le film le plus cher de son époque, Notre Dame de Paris est une oeuvre d'envergure voulue par la Universal, mais désirée avant tout par l'acteur Lon Chaney lui-même, qui avait acquis les droits du roman de Victor Hugo.

L'imposant budget servi entre autre pour construire le décor gigantesque de Notre Dame. Le sculpteur Finn Frowlich réalisa tous les bas-relief, mais aussi les différentes statues et les gargouilles. Un travail colossal, merveilleusement mis en avant dans le film, comme lorsque Quasimodo virevolte de gargouilles en gargouilles, escalade ou descend les corniches et la façade de la cathédrale. Plus de deux mille figurants furent engagés, 3000 costumes confectionnés, 700 lumières utilisées sous la direction de plus de 200 électriciens. Monumental. Heureusement pour la firme, Notre Dame de Paris fut un énorme succès et remporta plus de 3 millions de dollars, remboursant largement le budget alloué.

Ensuite, passées ces caractéristiques techniques, Notre Dame de Paris joue admirablement bien avec la thématique qui va hisser la Universal au sommet de la production "fantastique et épouvante" dans les années 30 : celle du Monstre. 

Car Quasimodo, le bossu sonneur de cloches de Notre Dame, en est un. Du moins physiquement. Cheveux en bataille, visage déformé, joues proéminentes, dents déchaussées, œil fermé, torse poilu et une bosse dans le dos, on ne peut pas dire que son aspect physique fait de lui un éphèbe en puissance. On saluera le travail admirable de Lon Chaney, qui, avec cette composition, devient une star. L'acteur a en effet conçu lui-même son maquillage, comme il le fera dans tous ses films, lui valant le surnom de "l'homme aux mille visages". Spectaculaire, l'apparence et la gestuelle de Quasimodo l'est assurément. 

Malgré son horrible faciès, la prestation éblouissante de Lon Chaney nous fait prendre ce "monstre" en empathie. Et comme dans bon nombre de films à venir, notamment le Freaks de Tod Browning bien sûr, les vrais monstres ne sont pas ceux que l'on croit. Car Quasimodo n'est qu'une pauvre créature souffrant d'un handicap mais qui possède un cœur, des émotions. Peut-on en dire autant de cette foule hurlante, moqueuse, acclamant le bourreau qui assène des coups de fouet au bossu ? Peut-on en dire autant de Jehan, qui laisse capturer Quasimodo par Phoebus et ses gardes lors de l'enlèvement d'Esmeralda alors que c'est lui qui lui a donné l'ordre d'agir ainsi et qui se garde bien d'assumer ces actes ? Seule Esmeralda offrira un peu de compassion au bossu, dans cette scène admirable dans laquelle elle se rue lui porter à boire après qu'il est reçu son châtiment.

Si on pourra regretter que Notre Dame de Paris ne soit pas une adaptation très fidèle envers l'oeuvre de Victor Hugo, si on pourra trouver que la mise en scène de Wallace Worsley soit un peu statique et manque d'ampleur, hormis dans les séquences avec Quasimodo, si on aurait aimé que les intrigues amoureuses entre les personnages soient un peu moins mises en avant et laisse plus de place à l'action, il reste que Notre Dame de Paris est un bien joli film et qu'il est le précurseur de tout le courant cinématographique de genre fantastique et épouvante américain.

Suite à ce succès colossal, la Universal adaptera une autre oeuvre littéraire en 1925, à nouveau avec Lon Chaney, et qui sera également un film important pour toute la vague de films à venir du studio : Le Fantôme de l'Opéra.

LA SCÈNE MARQUANTE :
Les cris de douleur de Quasimodo, fouetté en place publique devant une foule hilare. 

CARACTÉRISTIQUES
- SCÉNARIO : 4/6
- VIOLENCE : 0/6
- GORE : 0/6
- NUDITÉ : 0/6
- APPRÉCIATION GLOBALE : 4/6


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LE FILM

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HÄXAN, LA SORCELLERIE A TRAVERS LES ÂGES

HÄXAN, LA SORCELLERIE A TRAVERS LES ÂGES

FICHE TECHNIQUE

Titre français : La Sorcellerie à travers les Âges
Titre original : Häxan
Autres titres : Häxan: Witchcraft Through the Ages

Réalisateur : Benjamin Christensen
Année : 1922
Pays : Suède
Musique : Ludwig van Beethoven
Genre : Fantastique, documentaire
Interdiction : /

Casting
Benjamin Christensen (Le Diable)
Maren Pedersen (La sorcière)
Clara Pontoppidan (Une nonne)
Elith Pio (Le jeune inquisiteur)
John Andersen (Le chef inquisiteur)
Emmy Schønfeld (Marie)

Compagnie de production : Aljosha Production Company / Svensk Filmindustri

Première diffusion : 18 septembre 1922 (Suède)

Durée : 104 minutes


L'HISTOIRE
Le réalisateur Benjamin Christensen va nous proposer, en sept chapitres, un documentaire-fiction sur la sorcellerie à travers les siècles, et plus particulièrement sur la perception du Diable et des sorcières au Moyen-Âge. Durant cette sombre période de l'Histoire, plus de huit millions de personnes furent accusées de sorcellerie, torturées et brûlées, tombant sous le joug de la cruelle inquisition. Nous suivrons l'histoire de Karna, une vieille sorcière mais aussi d'une jeune femme qui pense que son mari a été ensorcelé et qui se rapproche d'un jeune inquisiteur, qui pense, à son tour, avoir été ensorcelé par la jeune femme...  

LA FIN DU FILM :
Benjamin Christensen parle de la perception de la sorcellerie à notre époque (les années 20) et met en avant les avancées dans la psychiatrie et les maladies mentales comme l'hystérie, maladies qui pouvaient conduire les gens à être pris pour des suppôts de Satan lors des siècles passés...

MON AVIS :
Réalisé la même année que Nosferatu le Vampire de Murnau, Häxan, connu également sous son titre français La Sorcellerie à travers les Âges, est un film à part puisqu'il s'agit avant tout d'un documentaire-fiction traitant de la sorcellerie, des sabbats, des sorcières et plus particulièrement de la chasse aux sorcières qui rythma l'époque du Moyen-Âge entre autre.

Film suédois dû à Benjamin Christensen, Häxan se compose de sept chapitres qui se veulent instructifs, érudits, historiques et intéressants. Le film dans son ensemble parvient très bien à assumer ses ambitions, malgré quelques raccourcis et approximations, et n'hésite pas à se montrer sans pitié envers le fanatisme et l'obscurantisme religieux, deux plaies universelles qui n'ont malheureusement pas disparues et se font même de plus en plus présentes en cette décennie 2010's. Ici, la religion visée est le Christianisme et il est bon de rappeler que les extrémistes catholiques n'avaient, à une certaine époque, rien à envier aux fanatiques de Daesh.

L'aspect documentaire est particulièrement présent dans le premier chapitre, puisque dans ce dernier, il n'y a aucune image filmée mais juste des images ou des représentations d'actes de sorcellerie, du Diable et de l'Enfer, commentées par le réalisateur lui-même, qui n'hésite d'ailleurs pas à interpeller à plusieurs reprises le spectateur au cours du film. Un premier chapitre thématique qui dénote avec le reste du métrage par cet approche purement documentaliste et scientifique, et qui pourra surprendre le spectateur s'attendant à voir un simple film d'épouvante sur des sorcières.

A partir du second chapitre, on bifurque dans l'univers cinématographique et Häxan se pare de superbes images nous plongeant dans le fantastique pur, nous présentant une vieille sorcière préparant potions et filtres d'amour à base d'ingrédients peu recommandables, ballets de sorcières virevoltantes dans le ciel sur leurs balais, apparition du Diable venant tourmenter les pauvres âmes en perdition ou participant à des sabbats frénétiques, accouchement multiple d'une sorcière donnant naissance à des enfants conçus avec quelques démons de passage, tentation d'une nonne par le Diable dans un couvent et j'en passe. Visuellement splendides, les images présentées aux spectateurs possèdent une force indéniable et Christensen à un sens de la mise en scène certain, aidé en cela par des effets-spéciaux (superposition, animation image par image...) et de maquillage très réussis.

Si la sorcellerie et ses représentations sont à l'honneur dans les premiers chapitres du film, Häxan devient ensuite, comme déjà évoqué, un vibrant réquisitoire contre les méfaits de l'Eglise et s'attarde à nous présenter la terrible Inquisition, à travers des scènes de chasse aux sorcières, de dénonciation, du procès hasardeux et de tortures diverses. Les procédés mis en place par les inquisiteurs pour faire avouer les pseudos-sorcières sont décrits complaisamment pour bien nous faire comprendre leur absurdité. Comme dit dans le film, le seul but de l'Inquisition est de faire avouer les victimes. Au vu des sévices et tortures prodigués, on comprend aisément que ces dernières finissent par avouer ce que leurs bourreaux veulent entendre pour mettre fin à leur supplices.

Häxan nous présente d'ailleurs certains instruments de tortures de l'époque médiévale et force est de constater qu'on n'a vraiment pas envie de les essayer ! Pince-doigts, ceinture ou anneau de cou pourvus de pointes acérées, table d'élongation des bras et des jambes, écrase-pied, broyeur de chevilles et autres raffinements sont mis en valeur et quand on sait que plusieurs millions d'innocents ont connu un véritable enfer au nom de la religion, ça fait froid dans le dos. On reste d'ailleurs bouche-bée quand une jolie jeune femme, pensant que son mari est ensorcelé, vient demander de l'aide à un jeune inquisiteur, qui en tombe amoureux. Refusant d'éprouver ce sentiment, il mettra ça sur le compte d'un envoûtement et dénoncera la malheureuse comme étant une sorcière ! Une aberration qui laisse pantois. Un carton-titre nous dit d'ailleurs "qu'il n'est pas bon être une femme vieille et laide, ni jeune et belle".

La fin du film évoque la sorcellerie telle qu'on la conçoit à l'époque de celui-ci (les années 20) et Christensen traite de la psychiatrie, rationalisant par la même occasion ce qui apparaissait comme démoniaque au Moyen-Âge. On sait par exemple que les inquisiteurs enfonçait une pointe dans le dos des personnes soupçonnées de sorcellerie et que certaines ne ressentaient aucune douleur, prouvant leur dévotion au Diable. La connaissance de la maladie de l'hystérie vient annihiler cette croyance comme l'explique la séquence dans laquelle un médecin fait le test d'époque sur une de ses patientes atteinte de ce trouble.

Oeuvre hors norme, somptueux livre d'images, implacable plaidoirie contre le sectarisme religieux, Häxan, La Sorcellerie à travers les Âges est assurément le film précurseur de toute la vague de longs métrages horrifiques mettant en scène l'Inquisition, du Grand Inquisiteur à La Marque du Diable entre autre. Si l'aspect documentaire, fort insistant tout de même, risque de déconcerter le spectateur, il n'en reste que les visions du Diable et des sabbats orgiaques, teintés d'érotisme, ainsi que les scènes traitant de l'Inquisition et de ses égarements, possèdent encore une puissance évocatrice et un style visuel qui en font un film muet majeur de cette décennie des 20's.

En 1968, le film fût remonté, raccourci à une durée de 77 minutes et commenté par William S. Burroughs.  

LA SCÈNE MARQUANTE :
La première apparition du Diable, superbement maquillé et interprété par le réalisateur lui-même.

CARACTÉRISTIQUES
- SCÉNARIO : 4/6
- VIOLENCE : 1/6
- GORE : 0/6
- NUDITÉ : 1/6
- APPRÉCIATION GLOBALE : 4/6


QUELQUES PHOTOS

 

 

 

 

 


LE FILM :

Disponible en double DVD chez POTEMKINE avec une version de 104 minutes, de 87 minutes et la version de 1968 racontée par William S. Burroughs

NOSFERATU LE VAMPIRE

NOSFERATU LE VAMPIRE

FICHE TECHNIQUE

Titre français : Nosferatu le vampire
Titre original : Nosferatu, eine Symphonie des Grauens
Autres titres : Nosferatu / Nosferatu, a Symphony of Horror

Réalisateur : F.W. Murnau
Année : 1922
Pays : Allemagne
Musique : /
Genre : Épouvante
Interdiction : /

Casting
Max Schreck (Le comte Orlok)
Gustav von Wangenheim (Hutter)
Greta Schröder (Ellen)
Alexander Granach (Knock)
Max Nemetz (Le capitaine)
Gustav Botz (Le professeur Sievers)

Compagnie de production : Jofa-Atelier Berlin-Johannisthal / Prana-Film GmbH

Première diffusion : 17 février 1922 (Pays-Bas)

Durée : 92 minutes


L'HISTOIRE
Hutter, jeune clerc de notaire venant de se marier avec Ellen, reçoit pour mission de la part de son supérieur Knock de se rendre en Transylvanie, au château du comte Orlok, ce dernier désirant acheter une maison dans la ville de Wisborg. Malgré la tristesse de son épouse, Hutter entame son long voyage. Il passe la nuit dans une auberge et remarque que le simple nom d'Orlok sème la terreur chez les habitants. Le lendemain, il est pris en chemin par un cocher qui le dépose au château du comte. Celui-ci vient l'accueillir et Hutter commence son travail de notaire en lui présentant les nombreux documents à étudier. Durant la phase de signature, Orlok remarque une petite photo d'Ellen. Hypnotisé par la beauté de la jeune femme, il décide d'acheter la demeure située près de la maison du couple. En épluchant une pomme, Hutter se blesse au doigt; La vue des gouttes de sang affole le comte qui se précipite pour s'en régaler, provoquant l'incrédulité d'Hutter. Le clerc de notaire découvre la véritable nature de son hôte mais se retrouve impuissant face à la force du vampire. Prisonnier dans sa chambre, Hutter aperçoit par sa fenêtre le comte charger plusieurs cercueils sur une charrette et quitter le château. Comprenant les intentions du vampire, Hutter parvient à s'échapper. Il est recueilli dans un hôpital après avoir fait un voyage périlleux. Pendant ce temps, les cercueils sont chargés dans la cale d'un navire qui quitte le port en direction de Wisborg. Peu de temps après, la peste se déclare sur le bateau, contaminant les membres de l'équipage. Le comte Orlok décime le reste de l'équipage et guide le navire vers Wisborg. En arrivant en ville, il dépose ses cercueils dans sa nouvelle demeure et propage la peste des les rues. Le notaire Knock, sous l'emprise du vampire, est placé dans un institut psychiatrique. Hutter parvient à rejoindre sa maison et décide de rester aux côtés d'Ellen pour la protéger. Mais le pouvoir du vampire est puissant et il oblige la jeune femme à lui ouvrir une fenêtre de sa chambre, lui permettant alors de rentrer à sa guise. Pensant sa femme malade, Hutter quitte la chambre pour aller chercher un docteur. Le comte Orlok en profite pour venir rendre visite à Ellen...

LA FIN DU FILM :
Alors qu'il est en train de sucer le sang d'Ellen, le comte Orlok entend un coq chanter. Il n'a pas vu le temps passer et les premiers rayons du soleil apparaissent. Impuissant face à l'astre solaire qui se déploie dans le ciel, le comte Orlok meurt et disparaît dans un nuage de fumée. Le Mal est vaincu.

MON AVIS :
En 1897, le romancier Bram Stoker publie un roman intitulé "Dracula". Je ne vous ferais pas l'affront de vous apprendre que le succès de cette histoire mettant en vedette un vampire a popularisé ce thème majeur du cinéma fantastique à tel point qu'on ne compte plus les œuvres traitant du vampirisme, que ce soit au cinéma, en littérature, en bande-dessinée ou en jeu vidéo d'ailleurs. Pour le seul personnage de Dracula lui-même, on dénombre plus de 200 films par exemple.

Il semblerait qu'une première adaptation du classique de Stoker date de 1921 : Drakula Halála, film hongrois dû au réalisateur Károly Lajthay, malheureusement perdu à jamais.

Pour éviter de payer les droits d'auteur aux ayants-droits de la famille de Bram Stoker, le producteur de la jeune société Prana-Film, désirant ardemment mettre en oeuvre une adaptation du roman, demande au scénariste  Henrik Galeen de rédiger un synopsis inspiré du livre de Stoker mais en modifiant le nom des personnages et le lieu de l'action. Londres devient Wisborg, Dracula devient le comte Orlok, Jonathan Harker devient Hutter, Mina Murray devient Ellen et le notaire Renfield devient Knock. Pour réaliser le film, Prana-Film choisit le réalisateur Friedrich Wilhelm Murnau. Ce dernier a déjà versé dans le cinéma fantastique et d'épouvante en 1920 avec Le Crime du docteur Warren, adaptation du roman de Robert Louis Stevenson, "Dr. Jekyll et Mr. Hyde".

A l'arrivée, on obtient donc Nosferatu le Vampire, dont le tournage débuta en juillet 1921. La majorité des scènes furent tournées dans les villes de Wismar (dont Wisborg est l'ancien nom), de Lübeck mais aussi dans les Carpates et notamment dans le château d'Orava. Disons-le de suite, Nosferatu le Vampire est un chef-d'oeuvre du cinéma fantastique et un des films les plus importants du cinéma muet. C'est une oeuvre fascinante, hypnotique, d'une grande beauté plastique et qui nous présente l'un des vampires les plus terrifiants vu à l'écran.

C'est Max Schreck qui a l'opportunité d'interpréter le comte Orlok. La production utilise le fait que cet acteur est inconnu du public pour monter un coup publicitaire éclatant : il s'agirait d'un véritable vampire ! Cette légende urbaine est admirablement reprise dans le film L'Ombre du Vampire, qui relate le tournage de Nosferatu. Même si Max Schreck n'est évidemment pas un vampire, son visage, sa gestuelle, associés à son maquillage, lui donnent un look angoissant et bien éloigné du charisme raffiné des futurs interprètes du personnage, Bela Lugosi et Christopher Lee en tête. Ici, on est réellement en présence d'une créature qui fait peur, avec ce crâne chauve, ses mains griffues et ses deux dents proéminentes. Une créature cauchemardesque, dont l'aura a continué de resplendir à travers les siècles et à qui certains réalisateurs ont rendu hommage, on pense à Tobe Hooper qui a reprit le look du comte Orlok pour son vampire des Vampires de Salem ou à Tim Burton qui a appelé le personnage joué par Christopher Walken "Max Shreck" dans Batman le Défi entre autre.

Véritable film d'épouvante, Nosferatu le Vampire est construit en cinq actes et fait preuve d'une belle progression dans la montée de l'effroi. Un effroi tout relatif de nos jours bien sûr, mais qui a sacrément dû impressionner les spectateurs de l'époque. Certaines séquences sont admirables (tout le film ne l'est-il pas d'ailleurs ?) et bénéficie de la puissance de la mise en scène de Murnau qui fait ici des merveilles. La séquence sur le navire est une merveille d’efficacité, l'utilisation des ombres lorsque le comte Orlok se rend chez Ellen est admirable et tout concourt à faire du film ce qu'il est : un joyau.

Bien sûr, Nosferatu le Vampire est bien loin des codes du cinéma actuel et son rythme, plus contemplatif que percutant, ne devrait pas jouer en sa faveur sur la génération "pop-corn" qui regarde un film comme on mange du maïs grillé. Pour ma part, je revois ce chef-d'oeuvre avec toujours autant d'admiration et de fascination, vision après vision. Je me laisse prendre par la main par ses sublimes images, j'oublie la prestation quelques peu théâtrales de Gustav von Wangenheim (Hutter) et Greta Schröder (Ellen), tout à fait normale pour cette époque, et je me transporte dans le château du comte Orlok pour assister aux malheurs du pauvre clerc de notaire puis sur le navire l'Empusa pour y voir la terreur des marins face à une créature vampirique de toute beauté pour enfin terminer mon voyage dans l'imaginaire à Wisborg, assistant à la vampirisation consentie de la pauvre Ellen.

Nosferatu le Vampire est un film-phare, une oeuvre ensorcelante et envoûtante, poétique, dramatique et terrifiante. Une date-clé du cinéma fantastique.

Remake en 1979 avec Nosferatu, Fantôme de la Nuit de Werner Herzog, avec Klaus Kinski et Isabelle Adjani.

LA SCÈNE MARQUANTE :
Dans la cale du navire, un marin s'attaque aux cercueils à l'aide d'une hache. Dans l'un d'eux se trouve le comte Orlok, qui se dresse d'un coup pour se défendre. Le vampire arpente ensuite le ponton du navire, en direction du pauvre capitaine, impuissant face au monstre. Le texte "le bateau de la mort a un nouveau capitaine" vient clore cette scène magistrale.  

CARACTÉRISTIQUES
- SCÉNARIO 5/6
- VIOLENCE : 0/6
- GORE : 0/6
- NUDITÉ : 0/6
- APPRÉCIATION GLOBALE : 6/6


QUELQUES PHOTOS

 

 

 

LE FILM

Un Blu-Ray du film est disponible ICI

LES TROIS LUMIÈRES

LES TROIS LUMIÈRES

FICHE TECHNIQUE

Titre français : Les Trois Lumières
Titre original : Der müde Tod
Autres titres : Destiny

Réalisateur : Fritz Lang
Année : 1921
Pays : Allemagne
Musique : /
Genre : Fantastique
Interdiction : /

Casting
Lil Dagover (La jeune femme / Zobeide / Monna Fiametta / Tiao Tsien)
Walter Janssen (Le jeune homme / Franke / Giovanfrancesco / Liang)
Bernhard Goetzke (La Mort / le jardinier / Bogner / l'archer)
Hans Sternberg (Le maire)
Karl Rückert (Le révérend)
Rudolf Klein-Rogge (Girolamo)

Compagnie de production : Decla-Bioscop AG

Première diffusion : 6 octobre 1921 (Allemagne)

Durée : 99 minutes


L'HISTOIRE
Un étranger au regard lugubre monte dans une diligence qu'occupe un couple de jeunes amoureux. Le véhicule s'arrête au abord d'une petite ville. L'étranger, qui n'est autre que la Mort, achète une parcelle de terrain située juste à côté du cimetière et la fait entourer d'une immense muraille sans porte. Il retrouve le couple d'amoureux dans une taverne et emmène le jeune homme. Inquiète de ne pas avoir de nouvelles de son fiancé, la jeune femme se rend devant la muraille et voit de nombreuses âmes la traverser. Comprenant qui est réellement l'étranger et ce qu'il est advenu de son fiancé, elle décide de boire du poison pour le rejoindre. Avant qu'elle ne puisse accomplir son geste, elle se retrouve face à la Mort et le supplie de lui rendre son fiancé. La Mort lui propose alors un marché. Il l'emmène à l'intérieur d'une citadelle dans laquelle sont dispersées des milliers de bougies. Chaque flamme représente une personne vivante et si la bougie s’éteint, c'est que son heure est venue. La Mort montre alors trois bougies à la jeune femme. Si elle parvient à sauver l'une des trois vies représentées par les trois flammes, son fiancé lui sera rendu. Elle se retrouve alors dans trois époques différentes, dans trois lieux différents mais ne parvient pas à remplir sa mission. Malgré ses trois échecs, la Mort, décidément bien clémente, lui propose une dernière solution : en échange de son fiancé, elle doit lui amener une autre vie...

LA FIN DU FILM :
La jeune femme tente, en vain, de trouver une personne sur le point de mourir ou qui accepterait de mourir. C'est alors qu'un terrible incendie se déclare dans une maison. Les occupants sont évacués à l'exception d'un nouveau-né. La jeune femme fonce tête baissée dans le brasier pour trouver le chérubin. La Mort lui apparaît alors et tend les bras, prête à recevoir l'enfant en échange du fiancé. Mais la jeune femme refuse au dernier moment d'échanger la vie de son fiancé contre celle du nouveau-né et sauve ce dernier des flammes. Elle propose alors sa propre vie à la Mort afin de rejoindre son fiancé pour l'éternité.

MON AVIS :
Est-il besoin de présenter Fritz Lang ? Ce génial metteur en scène a offert tant de chefs-d’œuvres au cours de sa carrière, et ce, dans différents genres, qu'il me semble inutile de le mettre en lumière, sa filmographie se suffisant à elle-même. Qui n'a jamais entendu parler ou même vu la saga du Docteur Mabuse, Metropolis, Le Tigre du Bengale et sa suite Le Tombeau Hindou, La Femme au Portrait, Les Contrebandiers de Moonfleet ou Le Secret derrière la Porte ?

En 1921, Fritz Lang a déjà six longs métrages à son actif. Avec Les Trois Lumières, il nous offre un film très poétique, un conte fantastique dans lequel le thème de la destinée (titre américanisé du film et parfaitement adapté ici) et celui de la fatalité prédominent, puisqu'on va assister à la destinée multiple d'une jeune femme qui va tout faire pour gagner un combat contre la Mort elle-même ! Mais peut-on espérer gagner contre une entité immortelle ? Et l'amour peut-il être plus fort que la Mort ?

Ces questions, Fritz Lang va les traiter à travers un fil conducteur et trois histoires dans Les Trois Lumières. Oui, ce film peut être vu comme un film à sketchs et reprend d'ailleurs le procédé vu dans Cauchemars et Hallucinations, à savoir faire interpréter différents personnages aux acteurs principaux du fil conducteur dans les diverses histoires.

Le fil conducteur nous présente donc la Mort, superbement interprétée par l'acteur Bernhard Goetzke, dont le visage et la gestuelle donnent à cette entité tout son aspect lugubre et terrifiant. Cette dernière va donc prendre la vie d'un jeune homme "car son heure est venue", tout simplement. Sa fiancée va tenter de négocier un sursis et va pactiser avec la Mort, celle-ci lui offrant la possibilité de sauver trois vies, symboliquement représentée par la flamme de trois bougies, les fameuses "trois lumières" du titre.

Ce fil conducteur nous propose de très belles images et des idées intéressantes, comme ce mur gigantesque que la Mort fait construire autour du domaine qu'elle vient d'acheter et qui ne possède pas de porte ou le fait que le verre de l'étranger se transforme en sablier, évoquant le temps qui passe, inéluctable. La séquence dans laquelle des âmes fantomatiques traversent cette muraille est très belle. Il en va de même pour l'intérieur de la citadelle entièrement décorée par des bougies. Fritz Lang manie l’esthétisme avec brio et dégage de ses images une grâce poétique certaine. On notera également une certaine ironie de sa part quant à sa représentation des bourgeois, ces derniers n'appréciant pas l'étranger venu dans leur ville mais acceptant de lui vendre un bout de terrain en échange de son argent.

La suite du film prend donc la direction du film à sketch puisque, aux trois lumières du titre, s'associent trois histoires d'amour fou, trois récits dans lesquels la destinée et la fatalité seront présentes, avec, pour chacun d'entre-eux, le même but à atteindre pour le personnage féminin : sauver son amoureux. Une mise en parallèle du fil conducteur donc.

La première histoire se situe en Perse. Zobeide, la sœur du Calife, est amoureuse d'un infidèle. Ce dernier est pourchassé par les hommes du Calife. Zobeide parvient à le dissimuler et à lui apporter son aide à l'intérieur du palais. Malheureusement, il sera fait prisonnier et le jardinier l'enterrera jusqu'au cou, dévoilant alors sa véritable apparence, celle de la Mort. Zobeide n'est pas parvenue à sauver son fiancé.

Le second récit se déroule en Italie. Le riche Girolamo est amoureux de la belle Monna Fiametta mais celle-ci lui préfère un séduisant jeune homme, Giovanfrancesco. Monna Fiametta a l'idée d'un plan pour se débarrasser de Girolamo et pouvoir vivre pleinement son amour avec son amoureux. Elle écrit deux lettres. Dans l'une, elle demande à Girolamo de la rejoindre à 22h, dans le seul but de le faire assassiner par son ami le Maure. La seconde est destinée à son fiancé. Mais Girolamo découvre le plan de celle qu'il convoite et fait échanger intervertir les deux lettres. C'est donc Giovanfrancesco, déguisé, qui vient à la rencontre de Monna Fiametta et qui meurt par l'épée du Maure. La jeune femme n'a pas pu empêcher la mort de son fiancé.

Troisième histoire, celle qui se déroule en Chine et qui possède l'aspect fantastique le plus prononcé. En effet, le magicien A Hi est demandé à la cour de l'empereur pour y présenter ses numéros. Ce dernier offre au souverain un cheval volant ainsi qu'une armée miniature. Mais l'empereur désire avant tout la fille du magicien, qui est déjà amoureuse d'un jeune homme. Après s'être enfuie avec son fiancé, la fille du magicien le transforme en tigre. Mais l'archer de l'empereur tue l'animal. La jeune femme n'a pu empêcher son amoureux de mourir.

Ces trois histoires, ces trois contes, jouent avec la destinée et la fatalité. La fin, tragique, de chaque récit était écrit à l'avance car on ne gagne pas contre la Mort. Le fait que les trois acteurs principaux interprètent les différents protagonistes des récits est un plus indéniable. Bernhard Goetzke est absent du second récit toutefois.

On appréciera le fait que dans tous ces récits, c'est le personnage de la femme qui est mis à contribution et qui s'impose par la force. Des récits qui jouent avec les thèmes universels de l'amour et de la mort, mais aussi avec ceux de la religion, du pouvoir. Intéressant également, ce côté "fragilisé" de la Mort, qui, las de prendre la vie des Hommes, offre une seconde chance à la jeune femme, voire même quatre chances si on veut être logique avec le film, de contrer la fatalité.

Maîtrisé de bout en bout par un Fritz Lang déjà maître de son art, Les Trois Lumières est un bien joli film, parsemé de superbes images et de quelques effets-spéciaux désuets mais efficaces pour l'époque, notamment lors du récit situé en Chine. Romantique et métaphorique, Les Trois Lumières mette en exergue une vérité infaillible, qui sera un peu bousculée dans les années 2000 avec la saga Destination Finale : à la fin, la Mort l'emporte toujours.

A noter que Les Trois Lumières est l'un des films préférés de Luis Bunuel et d'Alfred Hitchcock.

LA SCÈNE MARQUANTE :
La montée, dans un cadre très expressionniste, d'un immense escalier par l'héroïne allant à la rencontre avec la Mort afin de négocier avec elle.

CARACTÉRISTIQUES
- SCÉNARIO :4/6
- VIOLENCE : 0/6
- GORE : 0/6
- NUDITÉ : 0/6
- APPRÉCIATION GLOBALE : 4/6


QUELQUES PHOTOS

 

 

 



LE FILM